FLYOSKÉ + TURBULENCE + WAR, 7 octobre 2000

UN BON PLAN DE TEUF !

Ce devait être, d'après le programme annoncé, une soirée terrible, et on y croyait. En effet, 36 heures de live, 18 lives annoncés, une association de 3 sons, et non des moindres (Turbulence + Flyoské + War), tout semblait aller en faveur de cette soirée. De plus, quelques noms connus achevaient de convaincre de l'intérêt artistique et musical de cette teuf. Sur place, entre Jouques et St Paul-lez-Durance, un lieu de nature superbe, petite clairière entourée de pins, proche de champs labourés et de vignes, on pouvait pleinement apprécier le choix du lieu par les organisateurs et d'ores et déjà les en féliciter. Pas de flics, ou si peu et si discrets. Du froid, certes, assez piquant, mais pas mordant ni paralysant.

ET POURTANT...

Qu'est-ce qui a fait que cette soirée nous ait semblé si glauque (car je suis loin d'être le seul à penser cela, sinon, évidemment, je m'inquièterais un peu) ? Je pense que nous sommes en présence de deux grands fautifs en interaction : la qualité de la programmation musicale et artistique et la forte présence du monde de la drogue en son sein. Cette critique est une position qui est difficile à tenir pour moi dans ce cas étant donné que, pour diverses raisons, nous n'avions pas nous-mêmes amené notre live, prévu pour le dimanche, mais je pense qu'il est nécessaire de l'exposer car si nous ne réagissons pas maintenant et très vite, le mouvement va forcément finir par s'embourber définitivement.

LA MUSIQUE

Ce qui nous a particulièrement impressionné, c'est la passivité des danseurs face à une musique très moyenne, et leur capacité à gober tout ce qu'on leur passait sans broncher. En effet, si j'ai déjà pu fortement apprécier le live des Maniaks il n'y a pas si longtemps, leur prestation à cette teuf m'a paru effroyablement plate, se cantonnant à des boucles sans surprise répétées infiniment, ennuyeuses à l'extrême. Seraient-ce les innombrables problèmes de son qui ont émaillé la nuit qui leur ont sabré leur prestation (car un malheur n'arrive jamais seul) ? En tout cas, même topo pour le live suivant (Mem Pamal, m'a-t-on dit), qui malgré quelques rares moments enjoués, a entretenu l'atmosphère lourdasse de la nuitée. Lui aussi a de plus été perturbé par des baisses de volume fréquentes.

Mais quelle déception que de voir des danseurs/moutons s'extasier mécaniquement et pousser des cris à chaque entrée de beat, si plate soit-elle, en sautillant comme des machines. L'arrivée de FKY, au petit matin, suivie de celle de John et Ber des Metek ont quand même remonté le niveau artistique de la fête. On connaît leur savoir-faire et, même s'ils ne donnent pas dans l'expérimental, leurs boucles sont bien rodées, joyeuses et entraînantes. De plus, ils n'ont pas subi comme leurs malheureux prédécesseurs les caprices du sound-system.

Toutefois j'eusse préféré une programmation plus risquée et plus pointue de la part des organisateurs. C'était bien cela qui manquait à la soirée : du risque ! Comment peut-on faire exploser une ambiance si aucun risque n'est pris, et si c'est un ron-ron (boum-boum) supra rodé qui anime le tout ? Ces considérations ne sont pas personnelles, je m'en garderais, mais bel et bien partagées par de nombreux participants à la teuf qui recherchaient toujours la petite touche expérimentale ou le petit truc qui chatouille.

L'AMBIANCE

Cette musique qui ne voulait pas décoller entraînait l'attention sur l'ambiance alentour, et mettait malheureusement en avant le caractère glauque de ce qu'on pouvait y voir. Une armée de dealers à la criée encerclait le dance-floor, chose qui ne gène pas toujours quand la soirée est animée et joyeuse, on peut toujours faire abstraction, mais qui saute à l'oeil quand elle ne l'est pas. Quand la pâtée musicale n'est pas top, le pékin drogué se repose sur l'effet de son produit sans vouloir communiquer, sans joie, sans enthousiasme, et le côté glauque s'amplifie malheureusement. Autre symptôme alarmant : dès qu'un cracheur de feu ou qu'un jongleur débutait une prestation, un maximum de people l'entourait très rapidement et il devenait le fruit d'une attraction sans égal dans la soirée. Soyons sérieux, nous avons tous vu ces spectacles, certes jolis et en phase avec la musique que nous apprécions, et nous remercions évidemment ces performers, mais une telle ruée vers eux cache à peine la recherche désespérée d'une animation par les gens, d'un petit quelque chose...

On peut malheureusement joindre à cet exemple un mouvement de foule qui a eu lieu dans la soirée pour aller voir une bagarre qui s'amorçait ("Wah ! Ca va cogner ! C'est auch !" etc.). C'est ça, le mouvement free ? N'est-ce pas pitoyable ? Ce qui l'est plus encore, et c'est là une forte déception pour moi qui croyais encore, naïf que je suis, que la flamme était encore brûlante, c'est qu'au moins la moitié des gens se foutaient éperdument de ce qui se jouait et se trémoussaient comme des machines apparemment sans aucune pensée critique pour la soupe qu'on leur servait. Pour parfaire le tout, ils dansaient sur un lit d'ordures, car pas une poubelle n'était visible à l'horizon.

Je salue donc tous les gars que j'ai vu distribuer des sacs, et je continue à encourager tous ceux qui engueulent ceux qui jettent devant leur nez, ne serait-ce qu'une capsule de cannette, car ils sont de plus en plus nombreux, et c'est bon quand même de se sentir solidaire sur un point positif.

UN PETIT SON PLUS LOIN

Je suis allé faire quelques tours un peu plus loin, écouter le petit son qui s'était installé plus haut sur la colline. Pas d'installations artistiques (contrairement, soulignons-le tout de même, aux installations flk/trb/war), une lumière dans le style néon, fixe, et une tente blanche des plus communes : ce n'est pas sur les visus qu'ils comptaient...

Mais sur quoi alors, car leurs mixes accumulaient disques connus sur disques sur-connus sur disques archi-connus ? N'est-il pas temps de tuer ses modèles, de se débarrasser de papa et d'oncle old free party, et de commencer à penser par soi-même, de quitter les sentiers battus pour les chantiers battants ?

QU'EN RETIRER ?

De nombreuses leçons. Tout penchait en faveur des sons qui organisaient la soirée. N'avions-nous pas dit lors du meeting intersoundz de janvier dernier "plus de lives, plus de lives, plus de lives !". Et bien cette soirée nous prouve une fois de plus qu'une bonne teuf est un ensemble de choses et qu'elle ne repose pas sur un seul facteur. Que le son plante est une chose, qu'un ou deux lives soient pourris en est une autre, mais que ces détails mettent en péril toute l'ambiance d'une soirée montre clairement que la fête n'était pas assez alimentée et plutôt proche de l'asphyxie. Il va falloir véritablement penser à faire vivre la fête, à accentuer les visuels, les spectacles, les performances. Il est vrai que les sons ont joué de malchance, car avec les noms annoncés, le spectacle promettait d'être fort réjouissant. Comme quoi, la preuve est faite que les noms, dans le domaine de la free, n'ont pas lieu d'être, et qu'à partir du moment où l'on se crée des stââârs, c'est la porte ouverte à tous les abus. Qu'est-ce qui est en cause, principalement ? La facilité ! La teuf, comme le revendique Kanyar, c'est le droit à l'amateurisme. Malheureusement, nous observons avec cette teuf des habitudes qui font penser fortement au monde du professionnalisme : le programme du samedi soir était en effet entièrement basé sur des noms. Des noms qui ont, certes, fait leurs preuves par le passé, mais c'est encore là un penchant de plus vers la facilité, le contraire même de l'amateurisme qui, de par ses difficultés au quotidien, se doit d'être toujours sur le fil et de se surpasser en prenant des risques pour sortir du lot. Je n'ai franchement rien contre les sound-systems organisateurs de la teuf, et je ne doute pas de leur intention d'avoir voulu bien faire, c'est l'état général d'une grande partie d'un mouvement que je pointe par la critique de cette teuf.

JOCKER ?

Certes, nous ne sommes partis qu'à 11h00 du matin, le dimanche, sur cette impression de teu-teuf du samedi soir, triste substitut à la boîte de nuit, et peut-être que le programme du dimanche a été plus réjouissant, peut-être... Mais si le choix est fait de garder le samedi soir pour la teuf, en concurrence directe avec les bars/clubs/boîtes, autant faut-il proposer mieux qu'elles, plus, bien plus que la simple gratuité de l'événement.




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